MARIE-JOSÉE ROY • photographe • Bas-Saint-Laurent • 418-605-1763..........................................

 

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rencontre | stephan lemay

EN OUVRANT LA PORTE de l'atelier, une plaque d'aluminium étendue sur le sol et recouverte d'épaisses spirales anthracite, bistres et sang de boeuf me saute aux yeux. Ces mêmes textures, traînées et taches collées sur le métal apparaissent dans les oeuvres de Stephan Lemay, dont plusieurs sont adossées au mur du fond. Une énergie brute se dégage de la pièce.

Il n'y a ni pinceau ébouriffé par l'usure, ni tube de peinture biscornu dans l'atelier de Lemay. On y retrouve plutôt des casseroles de différents formats, une cuisinière, une friteuse, des conserves vides, quelques grattoirs, une louche et des spatules de maçon. Tout l'arsenal pour travailler l'encaustique.

Stephan Lemay a un parcours aux multiples champs d'intérêt. La musique fait parti de sa vie autant que les arts martiaux qui l'ont amené à séjourner au Brésil pour y approfondir la technique de la capoeira. Tout ça est présent dans son travail pictural fortement influencé par les rythmes et le mouvement.

La spirale se retrouve sur toutes ses pièces, le plus souvent fragmentée. Stephan m'avouera qu'il puise son inspiration dans les cycles de la vie qui se répète à l'infini, qu'on en soit conscient ou non.

L'artiste se met rapidement à l'oeuvre. Il prend d'abord un bloc de cire d'abeille et le dépose sur une balance. 21 grammes. Il empoigne ensuite un sac de résine de Damar et en verse une bonne quantité dans un bol et pèse à nouveau l'ensemble minutieusement.

Il retire quelques cristaux du contenant. Voilà, le compte y est! Ne reste plus qu'à faire fondre le tout.

Stephan profite de ce moment pour déposer sur le sol quatre panneaux de bois de 2 pieds par 2 pieds et du même coup, se laisse aller à un instant de visualisation.

Une fois liquéfiée, l'artiste incorpore des pigments dans la cire, remue attentivement et filtre le liquide. Empoignant fermement le chaudron bouillant, Stephan commence à en verser le contenu sur les surfaces de bois. De belles taches anthracite au fini satiné se dessinent.

Porté par le résultat, l'alchimiste continue son rituel. Il mêle des pigments rouges à sa potion qu'il veut plus translucide cette fois. Les vapeurs se dégagent du bouillon dont la riche teinte ambrée me fascine aussitôt. Tournant autour de son tableau, l'artiste laisse échapper quelques flaques de liquide qui courent se blottir contre les traînées précédentes.

Stephan s'empare par la suite d'une spatule qu'il enduit d'une matière granuleuse, d'un brun chaud et profond. Du café! Il étend, gratte et superpose la couleur puis se recule.

L'oeil perçant, il regarde longuement son travail puis lève la tête en ma direction. «Ce sera tout pour aujourd'hui. Je dois laisser mûrir tout ça quelques heures... peut-être même quelques jours!»

La pièce n'est pas encore terminée. L'artiste sait qu'il doit retravailler son oeuvre. Ajouter du jaune ici, enlever des surplus de cire là.


Stephan admet que prévoir le résultat avec cette technique devient très difficile. Le geste, le mouvement, la texture l'intéressent surtout. Mais sa maîtrise du médium lui permet de réaliser des abstractions dirigées. «Ce qui est bien avec la cire, c'est que si tu n'es pas satisfait avec une région du tableau, tu la fais fondre et tu recommences, tout simplement!»

Pour en savoir + sur Stephan Lemay, visitez son site.

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